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22 février 2008

un papa parle...

Nous étions deux. Nous nous aimions. Bien ou mal. Un bref instant ou le temps dune vie. Peut-être avons-nous décidé de faire un enfant. Nous étions naïfs, nous nous croyions puissants. Mais toi, bien au-delà de nos désirs et de nos soupirs, tu allais venir à ton heure, en ton temps.

Et un jour, avant même que nous le sachions, tu étais là, minuscule graine enfouie dans le secret. Plus petite qu'une poussière d'étoile, plus fragile qu'un flocon de neige, mais si volontaire, bien décidée à venir voir de quoi il en retourne, de ce côté de la vie.

Comme nous t'avons guetté, petit furet ! Moi, qui t'ai porté dans mon ventre, j'ai senti ta première roulade, bouleversante. Et je n'ai plus cessé de t'écouter danser. Et moi, qui t'ai porté dans mes yeux, j'ai vu les courbes tendres que tu as dessinées sur le corps de ta mère. Et je n'ai plus cessé de chercher à te deviner.

Soudain, ce fut la rencontre. Rien de ce que nous avions construit dans nos rêves na égalé cet instant unique ou le bonheur a épousé la douleur, ou ta peau a touché la nôtre. En une seconde, tu as tout fait basculer.

Une fois encore, tu nous as devancés. Par ton cris, tu as ouvert le premier la conversation qui tisserait nos liens, heure par heure, année après année. Nous t'avons répondu, t'appelant par ton nom. Nous t'avons parlé, dans murmure ébloui que toi seul as compris. Et quand nous avons commencé a pleurer, toi, tu tes arrêté.

Il y a une seconde, je ne te voyais que dans mes rêves. Maintenant tu es là, petit être offert au creux de mon bras. Vais-je te reconnaitre ? De mon regard affamé, je dessine la ligne de tes paupières, je me roule dans la rondeur de tes joues, je me noie dans les plis de ton cou. A présent, je sais. Je n'aurai jamais assez d'une vie pour m'emplir les yeux de toi.

Tes yeux s'ouvrent. Tu poses autour de toi un regard à l'intensité dérangeante. Un regard sans âge, un regard de sage qui interroge et qui sait à la fois. Et moi, comme un plongeur en eau profonde, je viens m'y noyer. Car dans ce mystère liquide jai trouvé tout ce que je pouvais chercher.

Petit poing farouchement serré. Dune caresse, je tente de l'apprivoiser. Tes doigts s'ouvrent et se déploient comme les plumes légères d'un paon, dévoilant lentement leur beauté, presque à regret. Je niche un doigt au creux de ta paume, et ton poing se referme sur lui avec une vigueur étonnante. Et moi, géant vaincu, je ne bouge plus.

Toi la chair de notre chair, signe vivant de notre intimité, nous osons à peine te toucher. Dans ton extrême nudité, tu inspires le respect. Mais, devant nous, voici venir des jours de soins et de caresses, et puis des nuits pour t'envelopper de tendresse. Peau contre peau, nous allons nous connaitre.

Quand, penchés au dessus de toi, nous te regardons dormir, nous retenons notre souffle pour entendre le tien. Tes paupières protègent ton secret, comme deux paravents japonais. Ta bouche entrouverte est émouvante d'abandon. Et tous ces petits tressaillements brusques et fugaces qui trahissent la vie bouillonnante, là, sous ton front lisse.

Nous serons les seuls à le voir. D'autres penseront qu'il ne s'est rien passé. Mais ton sourire n'en sera pas moins vrai, éblouissant, faisant exploser en nous un bonheur fou. Car l'éclat bref de ton sourire nous aura ouvert un monde. Un monde à réinventer pour toi, un monde à tapisser de joie.

Nous étions des amants, tu fais de nous des parents. Sans même le vouloir, nous allons nous creuser et ce vide en nous ne sera qu'amour pour toi. Pour toi nos regards attentifs et nos soins inquiets. Pour toi les mots patience, force et consolation. Nous inventerons des tendresses nouvelles, nous réveillerons d'anciennes chansons, nous rallumerons les rires et les jeux. Pour toi, le meilleur de nous deux.

Tes yeux auront peut être la couleur des miens. Ton sourire ressemblera peut être au sien. Mais tu seras unique, et jamais tu ne seras ni moi, ni lui, ni nous. Nous te dirons ce que nous savons, nous t'enseignerons ce que nous croyons. Mais toi, tu traceras ton chemin, qui ne sera ni le mien, ni le sien, mais le tien, ton chemin de liberté.

Un jour, nous ouvririons nos bras, et tu partiras. Nous qui t'avons aidé à naitre, maintenant, il nous faut t'aider à vivre. T'apprendre à vivre avec nous, puis loin de nous, puis sans nous. Nous devrons renoncer à toi un millier de fois. Nous te verrons grandir et changer. Un jour, nous ouvrirons nos bras, et tu partiras.

Nous avions rêvé d'un enfant et tu es venu. Ta présence si forte a chassé le flou pour laisser place à la netteté de ton visage, à la lumière de ton regard, à l'éclat de ton rire et au déchirement de tes pleurs. Ta réalité nous a étonnés, bousculés, émerveillés, meurtris. C'était toi, notre enfant ! Non pas l'enfant rêvé, mais un enfant à aimer, à comprendre, à connaitre. Bien mieux que le rêve, un homme, une femme qui s'éveille.

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Commentaires
S
Comment vas-tu ? bisous ;-)
J
un texte magnifique et émouvant ! merci ....
S
Ce texte est vraiment touchant et formidablement écrit...<br /> Moi qui vient de devenir maman, j'en suis toute émue!!!<br /> SOPHIE
M
C'est plein d'amour.
N
Quel merveilleux récit j'en ai des frissons. J'espères que tu vas bien.<br /> Bisous Nath
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